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28 septembre 1958 : Sékou Touré dit "non" à De Gaulle pour remettre la Guinée sur "la liste des pays libres"

  Enregistrer au format PDF  envoyer l'article par mail title=    Date de publication : lundi 29 septembre 2008
Dakar, 28 sept (APS) – La Guinée, seul territoire à avoir voté "non", le 28 septembre 1958, lors du référendum sur le projet de Constitution proposé par le général Charles de Gaulle, a posé ce geste sous la houlette de Sékou Touré (1922-1984) qui entendait ainsi remettre son pays sur "la liste des pays libres".

Le "non" du peuple de Guinée venait après "l’affrontement" du 25 août 1958 entre le leader guinéen et le général Charles de Gaulle alors en tournée dans les Territoires d’Outre-Mer pour faire la promotion de son projet de Constitution. Celui-ci visait notamment notamment la création d’une Communauté franco-africaine.

Devant des milliers de personnes venus accueillir le dirigeant français, Sékou Touré lance : "il n’y a pas de dignité sans liberté : nous préférons la liberté dans la pauvreté à la richesse dans l’esclavage" une des phrases clés de son discours. Agacé, de Gaulle répond que "l’indépendance est à la disposition de la Guinée [mais] la France en tirera les conséquences".

Le 16 septembre déjà à Conakry, Sékou Touré exprimait une position qui présageait un vote négatif au référendum, devant la Conférence territoriale du Parti démocratique de Guinée (section du Rassemblement démocratique africain) réunie pour examiner le projet de Constitution.

Le président du Conseil de gouvernement de la Guinée déclare à cette "Nous prendrons la responsabilité entière et totale de nos affaires. Une Nation nouvelle s’ajoutera à la liste des pays libres et le 28 septembre sera désormais notre fête nationale", ajoute-t-il. Le jour J le "non" l’emporte avec 1.136.324 voix contre 56.981 pour le "oui" sur un total de 1.203.875 votants. Il y avait 1.408.500 inscrits.

La Guinée est indépendante le 2 octobre, et Sékou est immédiatement "mis au coin" par l’ex-colonisateur, ainsi que par plusieurs leaders africains, raconte André Lewin, ancien ambassadeur de France en Guinée. "En revanche, ajoute Lewin, nombre de progressistes (africains et même français) affluent en Guinée pour aider le jeune État."

Analysant les résultats du vote guinéen, Sékou Touré estime, lors d’un meeting du PDG, le 4 novembre 1958, que "le paysan noir n’avait rien à perdre sinon une partie de la misère et de soin humiliation en accédant à l’indépendance".

"Le choix de la Guinée est donc un choix africain et il a traduit les aspirations profondes de nos populations", ajoute le leader guinéen. Il rappelle que "l’Afrique a vécu sur l’apport de la France. Elle demande à vivre avec l’apport de la France, mais si cet apport lui est refusé, elle saura vivre sans cet apport dans la dignité".

Touré se voulait clair : "la Guinée ne sera plus colonisée, que ce soit entendu une fois pour toutes. Les capitaux français trouveront dans ce pays une sécurité accrue et nous continuerons à faire appel à ces capitaux français et étrangers pour participer à notre essor économique".

En même temps, il estimait que la porte n’était pas fermée à une coopération avec la France. "L’indépendance nationale, précise-t-il, ne veut pas dire rupture avec la France ni cessation de collaboration avec la France dont la culture et la langue continueront à servir aux Guinéens. Mais la France n’a pas le droit d’être insensible à ces problèmes plus que les Guinéens. "

Le "non" de la Guinée le 28 septembre 1958 intervenait 60 ans jour pour jour après l’arrestation, par les Français, de l’Almamy Samory Touré (1830-1900), résistant à la pénétration coloniale auquel Sékou Touré était apparenté. Depuis la mort de Sékou Touré le 26 mars 1984, ce sont les militaires qui dirigent la Guinée.

ADC


Sur le site Pambazuka News lire le discours de Sékou Touré : Entre « la pauvreté dans la liberté » et « l’opulence dans l’esclavage »


lire aussi :
- Il y a cinquante ans, le 28 septembre 1958, se déroulait le référendum pour ou contre la Communauté franco-africaine Par Aboubacar Demba Cissokho (APS)
- et Référendum du 28 septembre 1958 : une bruyante campagne émaillée de dissensions par Aboubacar Demba Cissokho (APS)
- et sur Pambazuka News : Ahmed Sékou Touré : « Nous préférons la liberté dans la pauvreté à la richesse dans l’esclavage » par Tidiane Kasse
et (28-10-2008) : Les vérités sur le combat de Sékou Touré par Hadja André Touré
- et sur rue89.com : Pour la Guinée du "non" à De Gaulle, 50 ans de perdus par Boureima Diallo





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