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Sénégal : Gadio, le recordman du gouvernement est tombé

  Enregistrer au format PDF  envoyer l'article par mail title=    Date de publication : vendredi 9 octobre 2009
Neuf ans ministre sans discontinuer, qui plus est des Affaires étrangères !
C’est le record absolu et unique qu’aura battu le Docteur Cheikh Tidiane Gadio, sous le magistère d’un Abdoulaye Wade, président spécialiste des remaniements à répétition, qui depuis l’alternance politique intervenue en 2000, aura épuisé en moyenne une dizaine de ministres pour tous les autres maroquins concernés.

Wade était allé chercher Gadio aux Etats- Unis, où ce journaliste sévissait dans des ONG actives dans la lutte contre la malgouvernance.

Son introduction dans les milieux diplomatiques onusiens et américains était pour beaucoup dans sa nomination et sa longévité, face à un Wade qui voulait tenir l’ogre français, ancienne métropole, à distance. Gadio, journaliste et ancien professeur de télévision au Cesti de Dakar, le centre de formation des journalistes, fut ainsi consulté, non pas pour un ministère de la Communication qui semblait être taillé sur mesure pour lui, mais plutôt pour le portefeuille des Affaires étrangères, où il se révèlera à la hauteur..

Gadio, paradoxalement un homme de l’ombre, face au flamboyant Wade, aura fait les choux gras de la presse par deux fois en un mois. Il est vrai qu’un malheur n’arrive jamais seul. Une première fois, dans le chaud mois d’août, Gadio était cité à cause d’un fait divers impliquant sa fille, étudiante aux USA, venue en vacances au Sénégal. Celle-ci s’était fait rudoyer dans une boite de nuit de la place, suite à un incident avec un client un peu éméché. La famille Gadio s’était alors fendu d’un communiqué pour dénoncer l’agression et dire sa détermination à demander justice devant les cours et tribunaux. Pour la petite histoire, l’agresseur a finalement été condamné à 6 mois de prison avec sursis.

La deuxième fois où Gadio fit la Une de tous les journaux en ces mois chauds d’hivernage dakarois, c’est le lendemain de son limogeage, intervenu le 1er octobre dernier, comme un coup de tonnerre dans un ciel clair.

Cheikh Tidiane Gadio, 53 ans, était le coordinateur pour l’Afrique occidentale francophone du programme WorLD ( World Links for Development ) domicilié à la Banque mondiale à Washington, lorsqu’il fut nommé ministre des Affaires étrangères du Sénégal en avril 2000. Gadio a fait partie de la vague des ‘‘Américains’’, ces Sénégalais de la Diaspora que Wade est allé chercher à l’avènement de l’alternance pour en faire des ministres, dont Moctar Diop, éphémère ministre des Finances venu du FMI.

Abdoulaye Wade aura pu le qualifier de ‘‘meilleur ministre des Affaires étrangères en Afrique’’. A la tête de la diplomatie sénégalaise, le natif du village de Gadiobé dans la région du Fouta toucouleur, aura contribué à la résolution de nombreux conflits en Afrique. On lui doit l’accord de paix de Bouaké et aussi la résolution de la crise entre les protagonistes du conflit mauritanien né du pustch du général Aziz.

Si Gadio a pu être surpris par son départ inopiné d’un gouvernement au sein duquel il rempilait régulièrement, il n’en a rien laissé paraître. Il a tout de suite annoncé qu’il retournait a ses anciennes amours, les Ong de lutte contre la mal-gouvernance et pour la Renaissance africaine. Son départ a été unanimement déploré par l’opinion publique. Son remplaçant au poste de ministre des Affaires étrangères est Madické Niang, jusque la ministre de la justice et anciennement avocat d’Abdoulaye Wade.

Ancien combattant de la 2ème Guerre mondiale, le père de Cheikh Tidiane Gadio était aussi ancien président de la communauté rurale de Pété, dans le Nord sahélien du Sénégal. Gadio est un ex-enfant de troupe pour avoir passé toutes ses études secondaires au Prytanée militaire de Saint-Louis du Sénégal.

Après des études de sociologie et de communication à Paris, il obtient le Diplôme de formation pratique en technologies de la communication et élaboration de programmes pour l’enseignement audiovisuel à Montréal en 1986, puis, en 1994, un doctorat en Communication à Université de l’État de l’Ohio.

En effet, il revient de ses études supérieures parisiennes avec un Diplôme d’études approfondies en sociologie des moyens de communication obtenu à l’Université de Paris IV-Sorbonne (René Descartes) en 1984. A son retour au Sénégal, il est recruté comme enseignant au Cesti et fait des publications dans beaucoup de revues et journaux, dont la publication Sud Quotidien. De 1984 à 1988, il dispense au Cesti des cours dans les domaines des Technologies de la Communication et de production télévisuelle. Puis il ira chercher un doctorat aux USA. Durant son séjour américain, il animera en qualité d’analyste et de commentateur des questions politiques et économiques africaines un rubrique au sein de l’émission radiophonique hebdomadaire «  African Time   », diffusée dans les Etats de New York et du New Jersey et très suivie par la diaspora sénégalaise.

De retour au Sénégal après un doctorat en Communication de l’Université de l’Etat d’Ohio, en 1994, il réintègre l’enseignement du journalisme au Cesti, pour deux années, jusqu’en 1996. Puis, en compagnie du journaliste El Hadj Kassé, il fonde le cabinet KG a Dakar, spécialisé dans la consultance, qui comptera parmi ses clients plusieurs organismes ou projets des Nations Unies. Gadio anime également plusieurs conférences, en Afrique et aux USA, sur les questions relatives aux crises et à la gouvernance en Afrique. A l’approche de l’an 2000, échéance présidentielle majeure au Sénégal, il militera dans les milieux intellectuels en faveur de l’alternance. Puis devient le premier et seul ministre des Affaires étrangères de Wade durant 9 ans, étrennant le galon de Ministre d’Etat à partir de 2003. Le reste appartient à l’Histoire.

Après son limogeage, Gadio s’est fendu de sa plus belle plume pour remercier surtout l’opinion publique sénégalaise et l’opinion internationale, en proclamant son ambition de lutter contre la malgouvernance et pour la Renaissance africaine, en disciple de Cheikh Anta Diop qu’il est. L’opposition a perçu cette déclaration comme un appel du pied et n’a pas manqué d’inviter Gadio a rejoindre ses rangs pour faire partir Abdoulaye Wade du pouvoir en 2012. Gadio franchira-t-il le Rubicon ? Wait and see.

Ousseynou Nar Gueye, à Dakar




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