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ENVIRONNEMENT-SENEGAL : L’érosion côtière menace l’économie touristique

  Enregistrer au format PDF  envoyer l'article par mail title=    Date de publication : samedi 1er août 2009
erosion   tourisme  
DAKAR , 29 juil 2009 (IPS) - Au Sénégal, l’érosion côtière menace le tourisme, la deuxième source de recettes de ce pays d’Afrique de l’ouest. Les autorités cherchent à éradiquer le fléau, mais la riposte reste encore timide.
L’érosion de la mer sur la terre, c’est l’affaire des hôteliers. Je vois que la mer grignote les plages, mais nous autres, vendeurs d’objets d’art par exemple, n’avons pas de craintes à nous faire, déclare Djiby Kâ, dont la boutique s’ouvre sur une rue menant à la plage de Saly-Portudal, une petite station balnéaire de l’ouest du Sénégal. C’est le deuxième site touristique du pays après celui de Cap-Skiring, à Ziguinchor, dans le sud

"Si la mer continue d’envahir les plages, elles vont se rétrécir et cela fera venir moins de touristes ici. Cela peut handicaper le tourisme sans lequel nous n’avons rien à faire ici. Il faut que l’Etat trouve une solution’’ à l’érosion côtière, affirme Abdoulaye Dieng, un autre vendeur d’objets d’art à la Maison artisanale de Saly-Portudal.

"L’avancée de la mer entraîne forcément la réduction de la plage, ce qui va obliger les touristes à se déplacer vers d’autres sites. A Dakar, les plages sont petites et cela risque d’arriver à Saly-Portudal’’, prévient Cheikh Diop, un étudiant sénégalais à Nancy (France), venu passer des vacances dans son pays.

En 2006, l’érosion côtière avait rasé une bonne partie de Rufisque, dont un cimetière de cette ville située à l’est de Dakar, la capitale sénégalaise.

A Somone, sur la Petite Côte du Sénégal, à quelque 80 kilomètres de Dakar, les vagues avaient envahi la résidence Safari Village en 2004, déracinant le poste de surveillance des lieux, une énorme masse de ciment et de fer. "La mer continue aujourd’hui encore de ronger la plage’’, s’inquiète Ibrahima Dème, un gardien de cet hôtel.

Des maisons de Somone, un village au bord de l’océan Atlantique, portent encore les traces des vagues, qui ont rongé la plage et rétréci le quai de pêche. "Si nous n’avions pas interdit l’extraction de sable marin sur la plage, la mer aurait tout envahi’’, indique à IPS, Ass Sène, un jeune pêcheur de Somone.

Sur la plage de l’hôtel Téranga, dans la nouvelle commune de Saly, un ruban rouge alerte sur la menace des vagues qui ont déraciné de nombreux cocotiers de la plage.

"L’année dernière, les vagues avaient envahi notre maison. Nous avons ensuite tout reconstruit et avons mis des digues pour freiner les vagues’’, a dit à IPS, Mame Mor Faye, employé d’une grande et luxueuse maison donnant sur la plage de Saly-Portudal.

Dans cette petite ville, symbole de l’activité touristique au Sénégal, les hôteliers rencontrés par IPS refusent de parler de la menace de l’érosion côtière et des solutions qu’ils ont déjà préconisées : la construction de digues pour contrer les vagues.

"Certains hôteliers ont aménagé des digues, sans tenir compte des risques que cela peut avoir chez leurs voisins. Quand vous construisez une digue qui retient le sable, la mer creuse ailleurs. Autour d’une digue, la partie en face du courant marin prend du sable, la partie en aval va s’éroder’’, a expliqué à IPS, Papa Goumbo Lô, géologue environnementaliste, professeur à l’Institut des sciences de la terre (IST) de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar.

"Sur la Petite Côte, la zone de Saly surtout, l’économie est menacée. Cette partie concentre activités touristiques, transport maritime et pêche’’, a indiqué Isabelle Niang, ingénieur en géologie maritime et enseignante à l’IST.

"L’érosion côtière est la principale cause de destruction des écosystèmes marins et côtiers au Sénégal. Elle peut entraîner, progressivement, la destruction de certaines infrastructures hôtelières ou des plages, mais aussi la salinisation des sols, de la nappe...’’, estime Lô, également coordonnateur du comité scientifique du programme régional de lutte contre l’érosion côtière de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA).

Niang confirme cette explication à IPS : "Les plages et les sites de certains hôtels, qui accueillent des touristes, sont menacés. L’érosion côtière menace très sensiblement le tourisme... et vu que le tourisme est le plus grand fournisseur de recettes au Sénégal, après la pêche, on peut, sans se tromper, dire que c’est l’économie en général qui est menacée’’. Le projet de l’UEMOA doit étudier les causes de l’érosion côtière, dit-elle à IPS.

"L’érosion côtière détruit les cordons dunaires qui renferment une nappe phréatique, laquelle constitue un mur hydraulique contre l’avancée de l’eau salée à l’intérieur des terres’’, explique, pour sa part, Mamadou Sarr, un ingénieur hydrogéologue.

Sarr préconise, pour l’efficacité de la mise en œuvre du programme régional de l’ UEMOA, le renforcement des capacités et la sensibilisation des différents acteurs à l’impact de l’érosion côtière sur l’environnement.

Le programme régional de l’UEMOA est doté d’un fonds global de 141 milliards de FCFA (environ 306,5 millions de dollars) pour la protection des côtes des pays membres, indique Lô. Le Sénégal bénéficiera d’un financement total de 10 milliards de francs CFA (environ 21,7 millions de dollars) de ce programme pour construire des digues contre l’érosion côtière, au plus tard en 2013, ajoute-t-il.

Le financement sénégalais servira, entre autres, à la construction d’ouvrages de protection sur une longueur de quatre kilomètres sur la zone de Saly, à partir de cette année, selon Lô.

Le programme UEMOA de lutte contre l’érosion côtière concerne les huit pays de l’union : Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo, plus trois autres pays de la sous-région : Libéria, Sierra Leone et Ghana.

En outre, dans la zone de Mbao, dans la périphérie de Dakar, la construction d’une importante digue d’un coût d’un milliard de FCFA (environ 2,1 millions de dollars) est en cours grâce à un financement de la Hollande et du Sénégal.

"Actuellement, on assiste à une généralisation des problèmes d’érosion côtière au Sénégal. Les sites les plus touchés sont ceux où il y a beaucoup d’activités économiques et de populations : Saly, Joal (ouest) et Saint-Louis (nord) notamment’’, souligne Niang.

Dans un rapport de 2008 sur son Programme national de lutte contre l’érosion, la direction de l’environnement et des établissements classés - du ministère de l’Environnement - estime que les régions de Dakar, Thiès et Ziguinchor sont les zones ‘’les plus vulnérables’’ à l’érosion côtière. Le Sénégal dispose d’une côte de plus de 700 kilomètres. (FIN/2009)

Souleymane Faye


lire l’article sur le site ipsinternational.org : ENVIRONNEMENT-SENEGAL : L’érosion côtière menace l’économie touristique

lire aussi sur www.lagazette.sn (4 juillet 2009 ) : LUTTE CONTRE L’EROSION COTIERE : L’urgence d’une stratégie régionale, par Ahmed DIAME

et sur www.ouestaf.com (05 Août 2009) : Changement climatique : mobilisation d’élus ouest-africains pour sauver les zones côtières





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