le magazine du Sénégal dans le monde

Mots croisés avec… Katy Léna Ndiaye, réalisatrice : Au cinéma, on peut dire les choses comme on les sent

  Enregistrer au format PDF  envoyer l'article par mail title=    Date de publication : jeudi 13 janvier 2011
Ex-présentatrice de Reflets Sud sur Tv5, Katy Léna Ndiaye a présenté son deuxième documentaire, ’En Attendant les hommes’, au festival des arts nègres (10 au 31 décembre 2010). Rencontre avec une femme qui a choisi de faire des films pour défendre ses opinions.

source : www.walf.sn - 13/01/2011

Wal Fadjri : Qui est Katy Léna Ndiaye  ?

Katy Léna NDIAYE : Je suis une réalisatrice sénégalaise, documentariste, qui travaille en Belgique. Je suis née à Dakar en mai 1968. J’ai suivi mes parents en Occident quand j’étais toute petite, à 6 ans. J’ai fait de nombreux allers-retours. Je ne me suis jamais éloignée de ma terre natale. J’ai eu mon Bfem au lycée Lamine Guèye. Ce sont des allers-retours qui ne cessent jamais, finalement, c’est un point de départ pour ailleurs, mais on revient toujours ici. Mes parents sont originaires de Saint-Louis et de Louga.

Comment se décline votre parcours professionnel ?

Ma formation professionnelle, je ne l’ai pas faite ici, j’ai étudié en France et en Belgique. Je suis journaliste, je n’ai pas eu une formation de cinéaste. J’ai décidé, il y a dix ans, d’y entrer et j’y suis. J’ai longtemps travaillé en tant que journaliste pour le Cirtef et Tv5, où j’ai présenté l’émission Reflets Sud pendant dix ans. Depuis deux ans, je réalise ce magazine qui est devenu un rendez-vous hebdomadaire d’une certaine Afrique.

Qu’est-ce qui vous a amené au cinéma ?

Le raz-le-bol du journalisme. Je pense avant tout que le cinéma est un des derniers espaces de liberté où l’on peut dire les choses comme on les pense et les assumer. Car on choisit son cadre, son thème et on le défend face au public. En journalisme, on prend une parole que l’on restitue sans avoir de distance, sans critiquer, ni questionner les choses. On parle d’objectivité dans ce métier de journalisme, mais cela n’existe pas. En tant que journaliste, le documentaire est un prolongement naturel. Il s’agit de prendre une thématique, de poser un point de vue fort, des choses qu’on n’a pas forcément la possibilité de dire en tant que journaliste. Je ne critique pas tout du journalisme, ni tous les journalistes, mais je critique finalement le métier tel qu’il est.

Avez-vous trouvé cette liberté d’expression en tant que cinéaste ?

Cinéaste, cela veut dire quoi ? Cela veut dire que j’ai mon point de vue que je l’expose. J’ai ma subjectivité que j’installe et après on peut discuter. On est d’accord ou on ne l’est pas. On ne se cache pas derrière des questions d’objectivité.

Votre documentaire, "En Attendant les hommes", est-il empreint de la liberté d’opinion que vous recherchez dans le cinéma ?

C’est un portrait croisé de trois femmes mauritaniennes qui parlent d’elles. C’est une conversation avec moi-même, et au-delà de ce face à face, c’est un face à face avec le public en toute intimité. On parle d’amour, de sexualité, de famille, de la vie, des hommes. Le documentaire a été tourné à Oualata en Mauritanie. On était en période de fin de ramadan, la fête de la Korité approchait : c’était l’occasion pour les hommes qui étaient partis travailler à Néma, Nouakchott ou ailleurs de revenir. On était dans cette intimité de femmes et nous parlions des hommes, en les attendant…

Etait-il difficile de les faire parler sur des sujets considérés comme tabous ?

Sur place, il y a eu quelques réticences, mais finalement, avec la distance, on les a surmontées. Il fallait passer par là, convaincre. Je ne peux pas débarquer quelque part avec ma caméra et commencer à tourner. Pour que les gens me fassent confiance, il faut qu’ils aient confiance dans ce que je peux dire, filmer ou montrer. Le film a été produit en 2007. Le projet a duré 4ans et pour les repérages, le tournage m’ont pris deux à trois mois.

Avant "En Attendant les hommes", vous avez réalisé "Traces empreintes de femmes", vous faites du cinéma pour parler de la condition des femmes ?

Ma filmographie n’est pas très longue. Effectivement, étant femme, c’est la thématique féminine m’a intéressée et m’intéresse pour le moment. C’est quelque chose qui me tient à cœur. Mais la vie est longue. Sans doute, j’aborderai d’autres thèmes.

Pourquoi avoir tourné en Mauritanie, à Oualata particulièrement ?

Pourquoi pas ? (rires). Pourquoi cette question ? (Elle reste silencieuse quelques instants). Cela m’intrigue, parce que quelque soit l’endroit où je me trouve, on me pose toujours la question. Ça induit que, puisque je suis sénégalaise, je ne dois parler que du Sénégal. Disons que dans ce cadre-ci, c’est une série, c’est un triptyque. Le premier volet, c’était le Burkina Faso avec Traces empreintes de femmes et là c’était la Mauritanie. Le fil conducteur, ce sont les peintures murales. Parce qu’on dit que traditionnellement les femmes peignent leurs maisons. Mais, c’est un prétexte pour questionner la société à travers les paroles de femmes.

Où sera tourné le troisième volet du triptyque ?

Je ne sais pas encore.

D’où vous est venue la passion de faire des films ?

Beaucoup de cinéastes m’ont inspirée. La liste est longue. Je peux en citer feu Samba Félix Ndiaye, parce que c’est un documentariste, c’est une personne précieuse et généreuse dont le cinéma est nourri de réalités. Je n’ai pas eu l’occasion de travailler avec lui. Je l’ai rencontré et on a beaucoup discuté.

Propos recueillis par Fatou K. SENE


lire aussi sur www.africine.org (06/12/2008) : Entretien avec Katy Lena Ndiaye - La vocation du documentaire , par Hassouna Mansouri





Lettre d'info

Recevez 2 fois par mois
dans votre boîte email les
nouveautés de SENEMAG




© 2008 Sénémag      Haut de page     Accueil du site    Plan du site    admin    Site réalisé avec SPIP      contact      version texte       syndiquer