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Transparence dans l’acquisition et la gestion de l’aide : L’Union européenne dénonce le double jeu du Sénégal

  Enregistrer au format PDF  envoyer l'article par mail title=    Date de publication : jeudi 4 septembre 2008
Au moment où les partenaires techniques et financiers du monde, signataires de la Déclaration de Paris sur l’Efficacité de l’Aide, se réunissent à Accra, au Ghana, pour évaluer les efforts accomplis depuis trois ans que ladite Déclaration a été signée, l’un des plus importants des partenaires du Sénégal, le directeur du Développement de la Commission européenne, juge que les dirigeants du pays devraient faire preuve de plus de transparence dans la gestion des finances publiques.

source : LeQuotidien Jeudi 4 Sep 2008
Pour bénéficier efficacement de l’Aide des partenaires financiers, le Sénégal a besoin de mettre de l’ordre dans ses affaires, et de cesser de tenter d’opposer les donateurs les uns aux autres, a déclaré avant-hier, 2 septembre, à Accra, le directeur au Développement de la Commission européenne, M. Stefano Manservisi. Ce haut fonctionnaire, qui s’exprimait au cours d’une conférence de presse en marge du Forum de Haut niveau sur l’Efficacité de l’Aide, qui se tient dans la capitale ghanéenne pour trois jours, a indiqué que les bailleurs avaient besoin de plus de visibilité et de transparence dans la manière dont l’argent était géré.

De manière un peu ironique, Manservisi a objecté que les partenaires avaient besoin de voir que le budget qui était appliqué, était bien conforme a celui qui avait été voté par l’Assemblée nationale. « Mais si on nous demande un jour de mettre de l’argent dans la Grande muraille verte, le lendemain, on nous sollicite pour la construction de l’Université du futur africain, et un autre jour, pour des grands travaux d’infrastructure, tous des projets qui n’ont pas été pris en compte dans le budget national, il est évident que les partenaires ne peuvent pas suivre. » Le haut fonctionnaire européen répondait ainsi à une critique sur les faiblesses des taux de décaissement de l’appui européen au Sénégal. Il a formulé ces critiques en reconnaissant qu’il y avait également des efforts à faire de leur côté, aussi bien par rapport au Sénégal qu’à d’autres pays.
Néanmoins, dans le cas du Sénégal, l’adjoint du Commissaire Louis Michel indique que les dirigeants ont intérêt à jouer avec franchise et l’appropriation pour permettre de donner une impulsion aux montants de l’aide. « Mais si les dirigeants préfèrent travailler avec tel bailleur pour tel projet et tel autre pour un autre projet, il est évident qu’ils auront autant de procédures qu’il y aura de partenaires. Ce qui va d’autant retarder les résultats espérés », a-t-il indiqué.

Le directeur européen du Développement a abordé également les résultats que son institution espérait de la rencontre d’Accra. Pour M. Manservisi, il serait bien que la rencontre d’Accra permette d’avancer un peu plus loin que la Déclaration de Paris en 2005. Pour lui, l’intérêt de la conférence qui réunit des délégations ministérielles de plus de 150 pays, et qui a été précédée par deux jours de session des Organisations de la Société civile, devrait permettre à tous les partenaires d’identifier les zones où des efforts doivent être faits, et y porter toute leur attention. Il a rappelé que la rencontre d’Accra est destinée à évaluer les progrès réalisés dans la mise en oeuvre de la Déclaration de Paris sur l’Efficacité de l’Aide, et ce sont ces progrès qui permettront des progrès lors des rencontres de New York et de Doha, qui doivent se tenir avant la fin de cette année, pour réfléchir sur les progrès accomplis et les moyens de financer les Objectifs du millénaire pour le développement (Omd). Ces Omd, au nombre de huit, visent globalement à réduire de moitié le nombre des pauvres dans les pays en développement, dont le Sénégal.

L’Europe doit s’unir
Pour le directeur Manservisi, le but de la conférence était d’appeler les 27 pays européens à unir et à coordonner leurs efforts pour obtenir de meilleurs résultats dans la fourniture de l’Aide. Selon lui, « l’Europe qui est le plus grand donateur du monde, de concert avec les pays membres, devrait parler d’une seule voix en matière d’aide ». La commission souhaite que le Vieux continent soit en phase avec le système d’implication individuelle des Etats dans certains pays, afin d’augmenter l’efficacité des interventions.
Il a ajouté que la Commission a avancé dans cette voie en adoptant des procédures qui permettent de réduire fortement les conditionnalités et accroissent la prévisibilité de l’Aide. Il pense que là où des faiblesses sont notées dans la délivrance de l’Aide, elles pourraient justement s’améliorer avec plus de concertation entre les Etats membres de l’Union européenne. Une fois que l’Europe aura atteint ce résultat, elle pourrait demander plus facilement la même concertation à d’autres partenaires qui, à l’image des Etats-Unis d’Amérique ou de la Chine et de l’Inde, sont plus tentés de jouer en solitaire.

Urgence avérée Quoi qu’il en soit, un échec du Forum d’Accra serait difficilement acceptable, et Manservisi l’a reconnu. Ses paroles venaient en écho de la déclaration de Mme Mary Chinery-Hesse, premier Conseiller du président de la République du Ghana, lors de la cérémonie d’ouverture. Alors que son pays a été salué comme l’un de ceux qui, dans le monde en développement, a accompli le plus d’efforts dans la mise en application des recommandations de la Déclaration de Paris, Mme Chinery-Hesse a déploré : « En dépit de tous nos efforts, ironiquement, l’Aide est de plus en plus fragmentée. Le défi d’accomplir des progrès doit mettre l’accent sur un plus grand alignement. Il y a un besoin d’aller de l’avant avec un sens nouveau de l’urgence. Nous ne devons plus seulement parler des choses à faire, nous devons les faire. » Elle a également souhaité que ceux que l’on appelle les « donneurs émergents », deviennent partie prenante à la Déclaration de Paris.
Si le discours de Mme Chinery-Hesse a été applaudi, autant que les déclarations de sa coprésidente, la directrice de l’Unicef, Ann Veneman, les déclarations de l’adjoint de Louis Michel ont laissé perplexes certains observateurs auxquels elles ont été rapportées. Ces derniers considèrent que le souhait d’harmonisation de l’aide de toute l’Europe est juste un moyen de donner plus de poids et de puissance à la Commission, aux dépens des Etats. Et ces personnes ne sont pas convaincues que les pays bénéficiaires en profiteraient plus pour autant, au regard des procédures européennes de décaissement.

Auteur : Mohamed GUEYE (Envoyé spécial)




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