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L’Afrique célèbre les 90 ans de Nelson Mandela, aujourd’hui : Le Modèle du Cap au Caire

  Enregistrer au format PDF  envoyer l'article par mail title=    Date de publication : samedi 19 juillet 2008
Ce 18 juillet 2008, Nelson Mandela fête ses 90 ans. Un événement dont le symbole dépasse la simple matérialisation du temps qui passe. Marquer cette étape, c’est magnifier la vie et l’œuvre d’un homme qui a fini d’entrer dans l’Histoire. Une vie de refus, de résistance, de lutte et de liberté confisquée qui symbolisent le passé de l’Anc. Mais aussi, une vie de grandeur et de dépassement qui, à partir d’une vision, ont permis de bâtir l’Afrique du sud post-Apartheid, pour en faire une nation arc-en-ciel alors que tous les facteurs de rupture étaient là (politique, économique, social), pour installer un sombre chaos.

C’est pour rendre hommage à cet homme que des témoignages d’illustres africains ont été recueillis. Histoire de voir en quoi le symbolisme de Mandela interpelle aujourd’hui, une Afrique en errance. L’initiative a été lancée par Fahamu (www.fahamu.org), un réseau créé pour promouvoir la justice sociale en Afrique et l’émancipation des peuples de toutes formes d’oppression, dans le respect des diversités et l’expression de tous leurs potentiels. Parmi les activités de Fahamu figure la publication d’un journal en ligne hebdomadaire de référence, Pambazuka News (www.pambazuka.org), avec des commentaires et des analyses sur les enjeux politiques, économiques et sociaux essentiels pour le développement véritable de l’Afrique.
Pour les 90 ans de Madiba, quelques-uns des témoignages recueillis sous forme d’interviews par Pambazuka, auprès de personnalités africaines, sont publiés en collaboration avec Le Quotidien.

N’est pas Mandela qui veut ! On en a des exemples au quotidien, à profusion. Entre les grands prétentieux qui passent plus de temps dans les airs que sur leur lit, les apprentis démocrates qui administrent leur pays dans la tyrannie mais qui n’arrêtent pas de rêver au Nobel, et les petits sorciers qui ne font confiance qu’aux mirages de leur baguette magique, ils sont légion ceux qui auraient pu prendre Mandela comme repère politique.
Le fondateur de l’Afrique du Sud post Apartheid est un modèle. Il est « le » modèle ! Sur la base de son engagement contre les crimes éternellement haïssables de la ségrégation raciale, de l’encadrement humain qu’il a insufflé à son militantisme politique, et de l’exercice de ses fonctions comme président de la République sud-africaine, cet homme n’a point d’alter ego.
Dans une Afrique où le traficotage des lois et des constitutions est entré dans le lexique des activités sportives dominantes, Mandela reste un art de vivre politique pertinent. Héros modeste dans un pays sorti des ténèbres du racialisme d’Etat, il avait le pouvoir, tout le pouvoir. Il en usa si modérément, avec une intelligence si délicieuse et si digne d’estime, au profit exclusif des intérêts démocratiques d’une communauté en construction, qu’il se mit à dos une partie du puissant appareil de son parti, le Congrès national africain (Anc). Une légitimité presque sans limites, un charisme phénoménal, lui assuraient au moins deux mandats supplémentaires à la tête de l’Afrique du Sud. Mais il sut résister aux plaisirs de l’exercice aveugle du pouvoir dans un pays où tout pouvait lui être pardonné. S’il avait voulu que lui fussent reconnus quelques attributs de Dieu, l’affaire n’aurait pas fait bruit. Madiba, affectueusement appelé ainsi dans son clan, est un mythe vivant auréolé d’un passé et d’un présent structurés autour d’une formidable envie de rendre service à ses prochains.
Avocat de profession, il n’a peut-être pas des diplômes qui encombreraient une autoroute entre le Caire et le Cap, sa province natale. Par contre, il a démontré en 70 ans de militantisme, que la vie, la vraie, se construit dans la douleur, les privations, le cachot, l’exil, la résidence surveillée. Autant d’étapes par lesquelles il passa, qui lui donnèrent le statut enviable qui est le sien aujourd’hui qu’il n’est plus aux affaires.
Mandela est un homme profondément respectable. Il a su mettre en œuvre les modalités par lesquelles un leader politique atteint l’excellence. Dans une société démocratique, on ne naît pas dans le pouvoir, on ne s’arroge pas tous les pouvoirs pour son clan et sa descendance, on n’étouffe pas ses adversaires, on respecte les choix du peuple et on ne les trahit pas, on ne contourne pas les voies légales mais on les affronte, on n’absout pas ses propres turpitudes, on ne détourne pas les biens de la collectivité si on n’a pas pitié pas d’elle, on ne passe pas son temps à des manœuvres politiciennes pendant que le pays réel souffre mille maux, on ne remplit pas les cagnottes du train de vie de l’Etat sur le dos des populations… Juste, il fit de son mieux pour éviter tout cela. Il n’y est pas totalement parvenu mais il a montré, par l’action, qu’il en avait l’envie. C’est un homme cohérent et responsable. Sans doute, Mandela doit-il surveiller aujourd’hui les excroissances négatives qui se développent autour de l’icône mondiale qu’il est devenu.
Le monde est égoïste, meurtrier, scandaleusement indifférent aux drames quotidiens qui se jouent à ses quatre portes. Pendant que les spéculateurs de la bourse et de la bouffe prennent la terre en otage à travers d’impitoyables procédés d’accaparement, des humanitaires et d’illustres inconnus résistent avec leurs moyens, afin que des centaines de millions de personnes laissées sur le bord de la route aient droit à un brin de vie digne. Nelson Mandela est de ceux-là. Nous en avons encore besoin !

Auteur : Momar DIENG - LeQuotidien


visitez le site de Pambazuka News (en français)

lire aussi sur www.courrierinternational.com (03.06.2010) : Mandela, qu’as-tu fait de ton pays ?, par Breyten Breytenbach





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