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Mali, les ruines d’un business agricole

  Enregistrer au format PDF  envoyer l'article par mail title=    Date de publication : mardi 3 avril 2012
La ruée vers les terres agricoles au Mali est à la fois une aubaine pour l’économie du pays et un drame pour les populations rurales de la région de l’Office du Niger, dans le centre. Dans un Webdocumentaire, Le Monde Diplomatique retrace les étapes d’un projet censé enrichir le Mali et appauvrir les paysans de l’Office du Niger. « Ruée sur les terres agricoles au Mali », un document poignant signé Le Monde Diplomatique.

source : www.afrik.com - 8 janvier 2012

Soucieux de moderniser son agriculture, le Mali lance en 2008 un appel aux investissements étrangers. Et c’est la Libye qui est la première à proposer ses services. Le projet Malibya voit alors le jour dans la même année. A l’époque, les dirigeants libyen, Mouammar Kadhafi, et malien, Amadou Toumani Touré, s’entendent sur les clauses de ce qui est censé réduire la dépendance alimentaire du Mali et moderniser ses champs d’exploitation. Un projet ambitieux qui toutefois a causé de graves préjudices aux populations locales de la région de l’Office, épicentre du projet Malibya. Le Monde Diplomatique a publié un webdocumentaire à ce sujet avec pour illustration une série d’images inédites en noir et blanc.

Pour mettre sur pied 90 000 hectares de terres agricoles il a en effet fallu déplacer des villages entiers, parfois avec la force. Habituée à l’agriculture pluviale, le maréchage et l’élevage, la population rurale de l’Office du Niger n’arrive toujours pas à concevoir que l’on puisse détruire des terres agricoles traditionnelles pour en faire de vastes champs "à fric".

Pour elle, «  la terre c’est la vie ». Tout juste consultée, la population subit aujourd’hui les conséquences des grandes manœuvres foncières.

Le Journal du Mali écrivait le 25 septembre 2009 : « Pour les notabilités de Kolongo, à Ségou, le projet Malibya a conquis l’adhésion de presque tous les paysans. Au début des opérations, on n’avait rien compris. Il a fallu des échanges nombreux afin de faire comprendre l’utilité du projet. Aujourd’hui, chacune des familles touchées par le projet a eu son lot. Pour cela 13 ha nous ont été donnés sur lesquels nous avons prévu 130 lots à usage d’habitation. Mieux, la bagatelle de 116 millions de FCFA a été gracieusement distribuée aux recasés. »

«  Presque », précisait-il alors. En réalité, nombreux sont les paysans qui contestaient et contestent toujours cette décision. Ils ont dû être délocalisés, malgré eux. L’armée serait même intervenue pour expulser les plus coriaces. Quant aux dédommagements, un habitant de Kolongo, région de Ségou, affirme qu’ils ont été, contrairement à ce qu’avance le Journal du Mali, « très mal dédommagés ». La plupart des populations expulsées vivaient sur ces terres depuis « des cinquantaines d’années ». Aujourd’hui, ils dénoncent une expropriation.

Un projet au point mort

A Kolongo, la première étape du projet a été d’élargir un canal d’irrigation de 40 km et de construire une route. L’arrivée de machines agricoles a provoqué une levée de boucliers chez les habitants. « Aujourd’hui, le projet n’avance plus ». Quelques centaines d’hectares d’arachides et de tournesols ont été plantés.

Alors que l’irrigation n’a pas encore débuté, les maraîchers de la zone se plaignent déjà de la pénurie d’eau consécutive à l’élargissement du canal.

De toute manière, le contrat signé entre les deux Etats stipule que Malibya a la priorité sur l’accès à l’eau durant la saison sèche et dégage la société de ses responsabilités dans tout conflit pouvant surgir avec la population. En plus d’avoir déplacé des villages entiers, les deux gouvernements n’ont pas trouvé gênant de priver des centaines de villageois d’eau en cas de sécheresse, et ce, au profit du projet d’irrigation. Comme dirait Seydou Dembé du Syndicat des exploitants agricoles de l’Office du Niger : « Si tu souhaites que la terre t’appartienne il faut avoir l’argent, si tu n’en as pas alors tu es un animal. Nous sommes donc devenus des animaux. »

Pour les habitants de l’Office du Niger, le combat continue. En novembre 2011, ils participaient à la conférence Paysanne Internationale organisée à Nyéléni, sous l’égide de Via Campesina , mouvement international des paysans et des paysannes. Le rendez-vous avait rassemblé plus de 200 représentants d’organisations paysannes et d’ONG, venus du monde entier et de l’Office du Niger pour protester contre l’accaparement des terres agricoles.

Fouâd Harit


visiter le site du webdocumentaire (philipperevelli.com) : Ruée sur les terres irrigables de l’Office du Niger

lire aussi sur www.monde-diplomatique.fr (16 décembre 2011) : Webdocumentaire : Ruée sur les terres agricoles au Mali

et sur www.grain.org (06 décembre 2011 ) : Au Parlement suédois, GRAIN en appelle à la fin de l’accaparement des terres



2 Dans les messages du forum

  • lire sur www.humanite.fr (16 Mars 2012) : Mali Et la famine menace la région...

    Sur les 13 millions d’habitants des pays du Sahel menacés par une grave sécheresse, 3 millions se trouvent dans le nord du Mali. Au Tchad, la saison de la faim a déjà commencé.

    À l’instar de la dizaine de pays de la bande sahélienne, qui traverse l’Afrique de la Mauritanie jusqu’au Soudan, le 
Mali est confronté à une grave crise alimentaire, conséquence des faibles précipitations en 2011. Pour la troisième fois en dix ans, la région est menacée par une sécheresse. La vie de près de 13 millions de personnes est en jeu. ...

    Voir en ligne : Mali Et la famine menace la région...

    repondre Répondre à ce commentaire

  • KAYES, 15 avril 2012 (IRIN) - « C’est la sécheresse qui a fait fuir les gens », a dit Ousmane Touré, un habitant de Kayes, une ville située à 450 kilomètres au nord-ouest de Bamako, la capitale du Mali. En autobus, il faut 10 heures pour faire le trajet et traverser les terres desséchées de l’ouest du Sahel. « Il y a toujours eu une tradition d’émigration, mais ce n’est que lorsque les récoltes ont été mauvaises, dans les années 1970, qu’on a assisté à un exode massif. Comme il n’y avait pas suffisamment à manger pour tout le monde, certains ont décidé de partir pour la France, l’Allemagne ou les États-Unis. Ils savaient que c’était la seule façon de nourrir les membres de leur famille restés à Kayes. Nous assistons au même phénomène cette année. » ...

    Voir en ligne : MALI : Au-delà de la sécheresse – « Les familles disparaîtront »

    repondre Répondre à ce commentaire



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