L’histoire du village de Guélackh« Sahel, génération durable » : Un documentaire multimédia de Géraldine Sroussi et Benjamin SireC’est au cÅ“ur du Sahel sénégalais, près de la frontière mauritanienne, à 40 km de Saint-Louis et de l’océan Atlantique que se situe le village peul de Guélack.
Pendant très longtemps, les peuls ont été des bergers nomades dont les caravanes tournaient d’un point à l’autre du Sahel en quête de pâturage pour leurs animaux.
Guélackh - « îlot de verdure » en peul- était naguère une oasis luxuriante, qui pouvait largement nourrir hommes et animaux qui s’y faisaient halte avant de reprendre la route.
Au moment de la grande sécheresse des années 70, le Sahel fut gagné par les sables et les oasis n’offrirent plus suffisamment d’herbe et d’eau, obligeant nombre des nomades peuls à se sédentariser avec leurs bêtes.
À cette époque, il n’y avait plus que sable, arbustes desséchés, très peu d’eau, pas de route, pas d’école, pas de médecin, juste des familles et leurs troupeaux qui survivaient difficilement de la vente de lait et de viande. Parce que leurs pères avaient obtenu un emploi dans les chemins de fer, deux enfants du village, Ousmane et Doudou eurent la chance inespérée d’aller à l’école jusqu’au bac puis de suivre une formation complémentaire à Saint-Louis. Tout juste revenus au village, les deux cousins fondèrent le Groupement des Jeunes Eleveurs de Guélackh ainsi que le Centre de Développement Intégré afin de mettre en place une exploitation agricole. Malgré les difficultés matérielles, Ousmane et Doudou, mirent rapidement sur pied une école de fortune et y firent eux-mêmes la classe. Au début, il n’y avait qu’une dizaine d’enfants, certaines familles étant réticentes à laisser leur enfants en classe tandis que la conduite des troupeaux réclamait leur présence. Mais Ousmane et Doudou persévérèrent tant pour eux, éradiquer l’ignorance était aussi vital que nourrir les ventres. Ils trouvèrent un compromis avec les habitants et instaurèrent un roulement horaire permettant aux enfants de concilier l’aide qu’ils devaient à leurs familles et leur instruction. Chaque fois qu’une difficulté se profilait, les deux cousins, motivés par leurs rêves communs et la prédiction du vieux sage, trouvaient des solutions auxquelles les habitants pouvaient s’adapter et participer. Par ailleurs, à cette époque, le village reçu l’aide de plusieurs ONG, en dépit de la légitime méfiance d’Ousmane et Doudou tant parfois les méthodes de ces structures « ne tiennent pas compte des réels besoins et créent souvent des dépendances incompatibles avec un développement durable ». Quelques années plus tard, l’histoire du village prit soudainement un autre tour avec l’arrivée d’un couple de français, Jean-Pierre et Martine qui faisaient un circuit de découverte dans le Nord du Sénégal. Le thé traditionnel fut servi tandis que le chef du village, Ousmane, Doudou et les Français faisaient connaissance, essayant de communiquer au-delà de leurs à priori respectifs, les uns ayant l’habitude du passage d’occidentaux en quête d’étendues désertiques et d’exotisme, qui promettent de vaines aides, les autres de villageois affluant en tendant les mains sans autres mots que : « donne, donne... »
Et là , à Guélackh, pas d’attroupements, pas de demandes de cadeaux, mais un accueil discret, attentif. Touchés par les idées et les paroles d’Ousmane et Doudou, Jean-Pierre et Martine retournèrent en France en faisant la promesse de revenir avec ce savoir-faire. C’était en 1995 et le début d’une amitié et d’une collaboration qui se poursuit encore aujourd’hui. Au bout de deux ans, le couple revint au village, accompagné d’une quinzaine de personnes mobilisées pour venir enseigner aux villageois leurs compétences en matière d’élevage, de jardinage, de santé et d’éducation.
Peu de temps après, les premiers essais de fabrication du fromage furent très concluants, laissant espérer des ventes bénéficiaires. Quinze fromages étaient ainsi fabriqués chaque jour puis revendus dans les restaurants de Saint-Louis. Les relations d’amitié entre les peuls et les Français se fortifièrent et c’est dans un élan commun que des projets furent pensés et discutés, la maîtrise d’oeuvre étant toujours laissée aux villageois. Les années passaient et le village se transformait, retrouvant un peu de sa luxuriance d’antan. Petit à petit et malgré les difficultés de toutes sortes, les habitants s’organisaient de mieux en mieux progressant sans cesse dans la connaissance des techniques agricoles, sanitaires et éducatives. Guélackh aujourd’hui Le gouvernement sénégalais d’Abdoulaye Wade apprit ce qui se passait dans ce petit village peul perdu au milieu du Sahel et lui aussi porta un intérêt croissant à l’expérience. Des ministres rendirent visite au chef du village et bientôt Guélackh fut promu village pilote. De proche en proche, c’est une dizaine de villages peuls environnants qui commencèrent à profiter de cette évolution. Par ailleurs, l’amitié grandissante avec le couple de Français permis à Ousmane, Doudou et leurs femmes de venir en France approfondir auprès d’experts l’apprentissage de techniques relatives à l’élevage des animaux, à l’agriculture, à la santé et à l’éducation. Au bout de six ans, en 2001, accompagnés de dix personnes, Jean-Pierre et Martine revinrent à Guélackh afin d’installer avec les villageois une pompe à eau solaire qui permis d’arroser les jardins qui se multipliaient, sans la contrainte de devoir tirer l’eau à la main. Tous les habitants gardent en tête l’image du premier filet d’eau qui sortit du tuyau après des heures de mise en place du système. Toujours plus convaincus des bienfaits de l’éducation, Ousmane et Doudou eurent l’idée d’ouvrir un centre de formation pour adultes qui permettrait aux populations des villages voisins de venir apprendre des savoir-faire et des techniques qu’ils pourraient à leur tour appliquer au sein de leurs propres villages. Depuis, Guélackh ne cesse de se développer dans tous les domaines, l’eau ne manque plus, l’hygiène s’est améliorée, la mortalité diminuée, et l’avancée du désert a été considérablement freinée. Tous les enfants de Guélackh et un grand nombre de ceux des villages voisins sont scolarisés et l’internat accueille désormais une quarantaine d’enfants défavorisés. c’est-à -dire environ deux cents enfants. Même les plus petits ont leur classe où ils sont occupés à des jeux d’éveil et d’adresse. De leurs côtés, les Français continuent régulièrement à venir aider les gens de Guélackh. Ils savent qu’un jour, le village n’aura plus besoin de leur aide. Ils ne viendront plus alors que pour le plaisir de rendre visite à leurs amis. Mais pour le moment, le travail continue là -bas et de nouveaux projets se mettent en place. Afin de renouer avec leurs traditions, le village a le projet de mettre en place un jardin de plantes médicinales traditionnelles qui permettrait de soigner un certain nombre de maladie de manière naturelle et peu coûteuse. Aujourd’hui, Guélackh est véritablement un village ressuscité du sable et de la pauvreté et son exemple se répand dans toute cette zone du Sahel. Plus que jamais, Ousmane et Doudou conçoivent le développement de leur village (et des autres) « dans des rapports d’homme à homme, et non dans des systèmes dans lesquels les hommes d’en bas restent broyés sans liberté d’entreprendre. » Géraldine Sroussi
regarder sur www.france5.fr le documentaire multimédia de Géraldine Sroussi et Benjamin Sire : « Sahel, génération durable »
« Sahel, génération durable » Télécharger..............................
lire aussi sur www.irinnews.org (14 juillet 2010) : SAHEL : Comment prévenir la prochaine crise alimentaire sur www.pambazuka.org (28 juin 2010) : Insécurité alimentaire, question agraire et développement “durable” en Afrique, par Marc Dufumier et sur ipsnouvelles.be (20 décembre 2010) : La désertification affecte un milliard de personnes, par Kanya D’Almeida |
Lettre d'info |